Enquête auprès des membres

Mensa, le haut potentiel intellectuel et nous
Enquête à Mensa Rhône-Alpes, juin 2008

Quelques membres de Mensa Rhône-Alpes, aidés par le livre de Jeanne Siaud-Facchin « Trop intelligent pour être heureux », ont élaboré un questionnaire sur nos raisons d’être à Mensa ainsi que sur la difficulté d’être un adulte surdoué. Il a été envoyé à tous les adhérents de Mensa RAL (une centaine à l’époque) et nous avons reçu 25 réponses desquelles est issue la synthèse ci-dessous.

Partie 1 : Le cheminement jusqu’à Mensa

Pour adhérer à Mensa, il faut remplir au moins l’un des 2 critères suivants : QI ou réussite au test d’entrée. Il existe cependant un cheminement personnel important avant de prendre un rendez-vous chez un psychologue ou de s’inscrire à une séance de tests. Cette première partie concerne cette étape ainsi que celles qui suivent l’annonce des résultats avec, surtout, l’adhésion à Mensa.

  • 1.1 Pourquoi passer les tests ?

Plaisir et curiosité

Il y a ceux qui connaissaient déjà Mensa et qui ont voulu passer des tests pour « retrouver du monde » ou « rencontrer d’autres Mensans, des gens qui me comprennent », « rencontrer d’autres personnes comme moi » ou « pour mieux me connaître ». Dans cette même optique, il y a des Mensans qui ont passé les tests par « curiosité » ou « pour le plaisir des tests », voire pour « confirmer des tests anciens passés dans l’enfance » ou à l’occasion de tests de recrutement.

Demande extérieure

Pour d’autres, la demande est extérieure. Ce n’est pas venu directement « de moi », mais des autres, « ma fille » ou « mon mari » qui m’ont poussée ou demandé de le faire. L’envie de passer les tests est venue également d’une recherche personnelle après la détection de précocité intellectuelle de mon/mes enfant(s). Il s’agit donc d’une recherche liée à une histoire par rapport aux proches. « J’avais très peur » reconnaît une Mensane.

Crise identitaire

Les tests sont aussi une réponse à « une crise identitaire », « un sentiment de solitude, de décalage ». La majorité des réponses porte en effet sur l’envie de « confirmer des impressions », pour « valider ou pas cette caractéristique HQI. »

Il s’agit là-aussi d’une recherche issue d’un cheminement personnel. Ainsi, plusieurs personnes « cherchaient à savoir si leurs difficultés, leur étrangeté, étaient imputables au HQI, pour savoir si je pouvais trouver une solution à mes problèmes. »

Dans le même ordre d’idée, certains vont encore plus loin en donnant au résultat des tests le droit de juger définitivement si j’étais « con », « intelligent ou bête » : « m’assurer que je n’étais pas le con que certaines personnes voulaient faire de moi ». Ce défi lancé à soi-même aboutit à chercher ses limites « Chiche, le nouveau défi, c’est d’entrer à Mensa. »

  • 1.2 Qu’as-tu ressenti à la découverte des résultats ?

A part ceux qui le savaient déjà, la grande majorité des Mensans a ressenti de la joie, de l’apaisement, de l’euphorie, de la fierté… « Comme un brouillard qui s’évapore ». « Les résultats des tests m’ont permis de mieux m’accepter, de me comprendre et de moins me juger», « cela m’a permis de retrouver confiance en mes capacités ». 2 réponses parlent de « vide émotionnel. »

Le plaisir du résultat a été ensuite, pour beaucoup, rapidement suivi par de l’inquiétude et des questions : « 2 sentiments contradictoires : soulagement et doute : si ce n’était pas vrai ? » Les doutes et questionnements prennent plusieurs formes :

– un HQI, à quoi ça sert ?

– intelligence innée ou acquise. Alors, mes enfants ?

– obligation de faire (… de nouveau) face à moi-même

– j’ai toujours un doute… suis-je vraiment haut potentiel, j’ai du mal à y croire ; je pense surtout que je ne suis pas comme les autres. Par contre, si je suis vraiment haut potentiel… colère : quelle perte de temps (je parle de toute la première partie de ma vie où je me suis laissée persuader que j’étais nulle !)

Certains qui le savaient ont ressenti quand même un soulagement : « Je crois que je le savais déjà », « J’ai ressenti un soulagement car j’avais enfin pu mettre un mot sur ma différence », un autre a seulement été surpris de réussir le test de compréhension verbale, une autre « Je n’ai pas été surprise car j’avais passé des tests à 14 ans et je savais avoir un QI élevé. Mon fils a passé le test en même temps que moi, nous nous sommes donc inscrits tous deux à Mensa après avoir reçu les résultats. »

  • 1.3 Pensais-tu que l’adhésion à Mensa pouvait constituer un complément à ta recherche ?

Pour presque tous, la réponse est positive. Vu que les termes « recherche initiale » restent vagues, chacun peut attendre de Mensa ce qu’il est venu chercher. Ainsi, sans le détailler, une Mensane parle de « plaisir salutaire », un autre, « d‘une suite logique » au passage des tests. Parmi les réponses plus détaillées, trois catégories se détachent qui rappellent d’ailleurs les réponses aux deux questions précédentes. Ainsi, l’adhésion à Mensa apparaît comme une étape complémentaire logique au passage des tests.

Une identité, une appartenance

« Je voulais appartenir à une catégorie, je n’étais plus seule sur terre. »

Des rencontres avec des pairs

Je voulais « sortir du contexte familial et professionnel, me sentir moins seul dans mon parcours de vie », «rencontrer d’autres Mensans », « rencontrer des gens à haut QI, même si j’ai été déçu. »

Obtenir des réponses

Je pensais « parler de mes interrogations sur des questions sans importance », « m’ouvrir à d’autres réflexions », « avoir des conseils sur la façon de m’intégrer à la société ».

Certains restaient néanmoins « sceptiques sur ce que Mensa pouvait leur apporter » et sont venus par « curiosité, ce n’est qu’une piste. J’ai surtout pensé que c’était un moyen, plutôt qu’un but ».

Partie 2 : La découverte de Mensa

  • 2.1 Mensa peut-elle constituer un complément à tes ambitions et motivations initiales ?

Même si 5 réponses sont négatives à cette question, la lecture des réponses positives montre que Mensa aurait une fonction intéressante pour ses membres. Ainsi, un Mensan pense que l’association « peut l’aider à se comprendre, à s’accepter, se développer, s’ouvrir », un autre souhaite « faire quelque chose de cette “différence” que je cache plutôt que l’utilise ». Toutefois, cette mission doit rester modeste car une Mensane constate que « cette aide est arrivée dans une moindre mesure que ce qu’elle espérait, mais elle espérait sûrement trop ». Une autre attend « une aide » et, dans le même temps, redoute une déception : «Mensa reste encore pour moi qu’une réponse à une errance de 40 ans. Je ne m’impliquerai que lentement et sûrement. »

L’aide peut être apportée grâce à « l’ouverture d’esprit » qui caractérise l’association selon un autre : « ma motivation primaire a toujours été de trouver des amis qui me comprennent, qui sont dans la même situation que moi, avec qui je peux donner de moi-même et recevoir des autres dans l’enrichissement mutuel. »

Un autre pense que, plus que l’association, ce sont les membres eux-mêmes qui ont de l’importance: « mes espoirs portent sur la personnalité des adhérents et la qualité de ma relation avec eux. »

  • 2.2 : Qu’es-tu venu chercher dans l’association ?

Ce que je cherche mais que je ne sais pas encore que je cherche … alors là c’est constructif comme réponse ! mais trop vrai…

Leurs pairs

Il y a d’abord la recherche de ses semblables, « le fait de rencontrer des gens “ comme moi ” », « mes pairs », « des compagnons de route ». Ces pairs offrent un sentiment d’appartenance, un statut, « …pour une fois ne pas être regardée comme quelqu’un d’étrange quand je me pose des questions improbables ou que je fais des remarques ou analyses avec dix coups d’avance. » ou encore : « Je suis venue pour rencontrer d’autres Mensans, faire avec eux des activités. » Ce sentiment d’appartenance apporte également « un soutien et une aide dans la gestion de ma différence. »

Comprendre…

Les adhérents cherchent également, à travers les contacts dans l’association à « se comprendre eux-mêmes, les autres ou le monde », « une émulation », « un enrichissement », « des réponses à des questions qui ont déjà évolué… »

…et échanger

Autre recherche presque unanimement partagée dans toutes les réponses, je cherche à « pouvoir avoir des échanges intellectuellement de haut niveau », avoir de « l’échange sincère et franc », de « l’émulation intellectuelle », des « conversations qui ne m’ennuient pas », des « rencontres interactives qui nous font réfléchir », « un brassage d’idées, un miroir de mon comportement lorsque je suis moi-même »…

  • 2.3 : que t’apporte l’adhésion à Mensa ?

Une sécurité

A ceux qui recherchaient leurs pairs, Mensa semble apporter une réponse positive à travers le fait de donner une « identité », une « forme de reconnaissance », le « fait de ne pas être différent seul ». Mensa est « une structure associative et des membres bien réels, ce qui recadre un peu mes pensées du type ”je suis folle” et ”seule à être comme je suis”. »

« Mensa m’apporte la reconnaissance de cet aspect de ma personnalité. »

En résumé, cette phrase reprise in extenso et représentative de ce que peut apporter Mensa : « Malgré tout un sentiment d’appartenance à quelque chose, les grandes lignes d’une notice explicative du pourquoi du comment. Disons que ça justifie aux autres pourquoi je suis différente, c’est donc plus précisément le sentiment d’appartenance comme une façade : « elle est différente, forcement elle est HQI, d’ailleurs la preuve c’est qu’elle fait partie d’une association de surdoués »… Donc c’est normal que je sois différente. Donc je ne suis pas « anormale ».

Du plaisir

Mensa permet de « nouveaux loisirs » et des « conversations qui ne m’ennuient pas », « des discussions riches », « une émulation entre les adhérents », « l’ouverture d’esprit permettant d’aller plus loin dans les discussions ». Une personne écrit : « formidable booster de vie pour un volcan endormi ». D’autres ajoutent des « découvertes » et des « rencontres avec des adultes surdoués (qui) sont des gens très fréquentables », « cela m’a rassurée » précise une Mensane.

Beaucoup soulignent le fait d’être « moins seuls », d’être « soulagés » par ce que leur apporte Mensa : « des moments où j’ai l’impression d’être juste moi et de ne pas réfléchir à être adaptée » ou encore « au début, la satisfaction de rencontrer des gens avec lesquels je n’avais pas besoin de m’expliquer longuement pour me faire comprendre, l’impression de rapidement comprendre mes interlocuteurs et en être comprise. » Un adhérent « apprécie les rencontres et les moments agréables mais sans l’enrichissement intellectuel attendu »

Partie 3 : Notre vision de nous-même

Dans l’idée de faire connaître la séance de tests gratuits de décembre 2007, une Mensane avait proposé la présentation suivante. Nous voulions savoir si ce texte suscitait l’adhésion des autres adhérents de l’association :

« Tu te sens seul mais souvent tu adores ça. Tu te forces pour avoir une vie sociale minimum. Tu ne comprends pas pourquoi les gens arrivent à parler pendant des heures des bêtises du petit dernier. Quand tu fais des blagues, personne ne rigole. Tu as du mal à exprimer tes idées et pourtant ça grouille dans ton cerveau. Il y a plein de choses que tu n’arrives pas à faire, mais parfois tu arrives à être hypertechnique et concentré sur un sujet très pointu. Tu fais plein de fautes d’orthographe, ces détails t’énervent. Tu es susceptible et hypersensible. Tu sens que ton job ne correspond pas à ce que tu pourrais donner au monde. Tu veux rencontrer des gens comme toi. »

Plus de la moitié des réponses confirment une grande affinité avec ce texte : « très bien rédigé », «texte très vrai », «réconfortant, émouvant, il m’aurait motivé définitivement à passer les tests gratuits ». Six adhérents ont souhaité néanmoins atténuer la question de l’orthographe « tout à fait sauf l’orthographe » et une qui reconnaît aimer parler du petit dernier. Une Mensane écrit : « J’ai été surprise de m’y reconnaître alors que je ne me reconnais en général pas dans la description faite des surdoués. » Certains s’y reconnaissent peu et invoquent d’autres problèmes.

Plusieurs réponses proposent des idées de phrases :

Du même rédacteur : Je m’ennuie au travail, je n’y trouve aucun sens. Je ne supporte pas la petitesse des gens. Je suis frustré d’avoir trop d’idées et de ne pouvoir les réaliser. Je crois que toute réponse est dans ” l’être ”, sans arriver totalement à le définir. Je me pose des tas de questions sur la vie sociale et relationnelle. J’ai horreur de l’autorité et du pouvoir. Je ne me sens moi-même que seul. J’aime l’égalité et la justice, et n’aime pas la différence.

D’un autre : Tu regrettes d’avoir pris trop tard conscience de tes potentialités. Tu ne savais pas comment exprimer l’existence de ton potentiel. Deux adhérents qui s’y reconnaissent tout à fait regrettent le côté pessimiste ou négatif. Un propose : « Apprendre est toujours un plaisir ». Une dernière écrit : Tu comprends les gens même quand ils ne disent rien. Et instinctivement tu cherches à soulager leurs souffrances en étant gentil(le), en les aidant ou en les faisant rire.

Partie 4 : De la difficulté d’être un adulte surdoué

Certains adultes surdoués connaissent une souffrance ou un mal-être qui semble propre à la douance. Les questions suivantes concernent cette caractéristique.

  • 4.1 La douance te pose-t-elle un problème spécifique ?

Il aurait été presque miraculeux d’apporter une solution avec 25 réponses à un questionnaire amateur. Les témoignages suivants sont très variés, plus complémentaires qu’opposés. En effet, nous naissons et grandissons tous avec nos problèmes, la douance peut les aggraver ou les corriger, la douance peut également générer des caractéristiques propres aux HQI.Cinq Mensans pensent que la douance ne pose pas de problème spécifique : « Il est toujours difficile de savoir si les difficultés qu’on éprouve sont dues à la douance. Tout le monde éprouve des difficultés sur cette Terre ! » ou encore « Si j’ai des problèmes, ils ne viennent pas de la douance. ». Plus explicite, cette longue introduction d’un autre Mensan : « En lisant la première fois la présentation de ce questionnaire, j’ai hésité car je ne suis pas convaincu du bien-fondé de cette démarche. D’une part, je n’attribue pas ces éventuelles souffrances au fait d’être surdoué – il peut y avoir corrélation, sans relation de cause à effet. D’autre part, je ne me reconnais pas forcément dans ce constat de souffrance à cause de mon « intelligence ». Au lieu de blâmer mon intelligence qui me ferait souffrir, je considère que c’est un don qui est constitutif de ma personnalité et dont je ne suis ni honteux ni exagérément fier. Grâce à elle, j’ai pu me hisser socialement en faisant des études d’ingénieur, ce qui me convient tout à fait et qui, par la même occasion, est un facteur de succès social. J’exerce un métier que j’apprécie, même si je ressens souvent de la frustration de ne pas pouvoir utiliser plus mon goût pour la logique. Là où je me sens moins bien c’est dans l’intégration à une société où l’avoir compte plus que l’être, où l’apparence et la forme comptent plus que le fond, où les cérébraux sont mal vus et pris pour des preneurs de tête, où on valorise l’immédiateté, la facilité et l’émotivité aux dépens de la réflexion et de la démarche intellectuelle rigoureuse et exigeante. Ce n’est d’ailleurs pas plus mal pour mon ego, car si je ne côtoyais que des surdoués je trouverais forcément plus fort que moi.Ceci dit, ces souffrances trouvent aussi un écho en moi, même si je ne crois pas que leur cause réside dans mon intelligence. Je dirais plus qu’il s’agit de souffrances assez répandues et qui pour la plupart sont liées à des difficultés d’intégration sociale. Je crains qu’à désigner l’intelligence comme responsable de ces souffrances, cela soit une espèce de leurre et qu’on évite ainsi de réfléchir à ce qui personnellement nous a conduit à cette situation. L’introspection et l’analyse de notre comportement dans son contexte me paraît indispensable. »

Parmi les autres réponses, quelques points douloureux sont mis en avant.

Être un étranger

Ainsi, un premier témoignage explique qu’il rencontre de « multiples problèmes : je citerais le sentiment de supériorité, l’ennui à l’école puis dans un cadre professionnel, le fait d’être réfractaire à un système que je pense mal conçu ou inadapté à moi, la difficulté à être heureux, difficulté également à me socialiser ou à me sentir à l’aise avec des gens qui ne partagent pas ma différence, sentiment de ne pas faire partie de la société, sentiment de décalage entre ma façon de penser, mes rêves, mes centres d’intérêt, et le monde réel. » Il existe donc une « difficulté à s’intégrer à la société », comme l’écrit un deuxième, idée reprise et développée par un troisième :

– de la frustration : non-reconnaissance, jalousie des autres, impuissance, manque de temps, désir de communiquer mais crainte de ne pouvoir être compris,

– de certains conflits : entre autorité (due à la compétence) et désir d’égalité, désir de décider et crainte des effets pervers du pouvoir,

– de l’impuissance : vis-à-vis de certaines dégradations dans le monde,

– des difficultés relationnelles : l’incompréhension mais surtout le fait de ne pas être sur le même plan.

Deux Mensans insistent également sur le rôle négatif de la famille quand elle n’accepte pas l’idée de la douance : « Elle peut être un problème lorsque cette spécificité n’est pas connue ou acceptée par l’entourage du futur adulte. », « quand j’ai reçu mon courrier d’admission, j’ai eu mon courrier, et c’est ainsi que j’ai été encouragé et surtout pas par ma famille. »

La réelle difficulté à s’intégrer dans la société peut certes résulter d’une névrose mais, comme le montrent les réponses, peut aussi résulter d’une socialisation inadaptée résumée par ces témoignages : « Oui, j’ai des problèmes pour m’adapter en société, des doutes bien sûr sur mes capacités qui me bloquent dans ma vie et cela me donne des difficultés à être heureux » ou encore « j’ai du mal à être comprise ».

Toujours douter de soi

« Doute sur les capacités, difficultés de communication ».

Plusieurs Mensans insistent aussi sur le doute permanent qui les assaille à tout moment et les fait hésiter, rester inactif, dans la vie courante. Malgré le « sentiment d’avoir toujours plusieurs coups d’avance dans une situation, même maintenant que je sais que j’ai un QI supérieur à 130 je me demande parfois si je ne suis pas débile… J’ai toujours un doute sur mes capacités. », « Le doute permanent s’estompe avec Mensa » explique un adhérent, « j’ai l’impression d’être étrangère à tout ça » complète un troisième témoignage.

Allant dans le même sens, un Mensan constate son « manque d’équilibre entre excès de confiance due à la différence de vitesse et d’acuité vis-à-vis d’un sujet, quel qu’il soit, et le manque de confiance… » ou encore, une autre : « à chaque fois que j’aborde quelque chose de nouveau mon esprit est traversé par un doute : serais-je capable de le faire ? ». Le doute conduit même un membre à la « procrastination ».

Se couper de ses émotions

L’excès de doute a également pour effet, parfois, d’isoler le mental des émotions. « A trop vouloir comprendre le monde, on finit par ne plus en être » : « Et puis mes relations aux autres. Déjà rien que pour dire bonjour dans un groupe, (à part si c’est bien codifié ou si c’est des gens que je connais bien), je frôle la crise d’angoisse : par qui commencer, bises/pas bises, et l’autre là qui ne me voit pas, je fais comment, et ces deux mains qui se présentent en même temps, laquelle dois-je serrer en premier sans vexer personne, et eux qui discutent, je les interromps ? Mais à quel moment ? etc, etc… »

Il existe une frustration au quotidien résumée dans cet autre témoignage : « frustration de ne pas plus utiliser mon intelligence au quotidien. Je voudrais sans cesse étudier mais au lieu de cela je m’occupe de la routine d’une mère de famille qui travaille… sentiment d’inadaptation sociale parfois. » Une autre avoue « la difficulté à garder des relations avec les gens, parce que je ne sais pas vraiment faire et puis j’ai eu une expérience malheureuse qui fait aussi que… (trahison de ma meilleure amie, je le savais que ça arriverait, mais je refusais de l’admettre). »

Les derniers témoignages rapportés concernent ceux qui ont surmonté leurs difficultés : « Elle m’en posait avant de l’avoir appréhendée, maintenant je comprends mieux ce qui m’arrive, je m’accepte mieux, je fais mieux la différence avec les autres. Je profite des bons côtés de la douance mais évidemment le doute permanent et l’hypersensibilité m’attirent encore des ennuis. » ou « je vis avec ma différence », « pas de difficulté à être heureux » voire enfin « La douance me plaît parce que j’ai toujours été précoce ».(sic)

  • 4.2 Mensa doit-elle t’aider dans ce cas ?

Il n’y a eu que 11 réponses à cette question. 4 ne pensent pas que Mensa puisse avoir un rôle actif : « Je pense qu’il faut d’abord se connaître et s’aider soi-même avant de chercher ailleurs » explique un sceptique, un autre écrit que « savoir que ça existe me suffit ».

Moins catégoriques, plusieurs doutent quand même de l’efficacité de l’association « Je lis beaucoup, je ne sais si Mensa peut m’apporter plus. ». D’autres estiment que les rencontres dans Mensa pourraient avoir un effet positif : « Pas sûr à part lors de rencontres pouvoir se rendre compte que les problèmes sont parfois communs et liés à la douance », « Non, à part peut-être dans l’échange d’expériences en toute humilité. », «non elle ne DOIT pas, elle PEUT c’est à chacun de tirer profit du meilleur de Mensa (comme on tire profit du meilleur de chaque expérience à condition d’avoir pris l’habitude de réagir de cette façon). » Cette façon de voir est confirmée par un Mensan qui écrit : « Elle le fait déjà par le seul fait d’exister et de pouvoir rencontrer des gens comme moi. »

Les derniers attendent modestement un peu plus, sans exigence particulière : « Si c’est possible j’en serais heureux. » « j’aimerais bien », « oui mais pas une obligation », « oui, mais probablement par un contexte favorable, par des thèmes spécifiques abordés par de petits groupes de personnes (2 à 4) avec partages d’expérience et recherches livresques ou net. ». Une seule personne est persuadée de la capacité de Mensa à aider : « absolument. » mais ne peut en préciser la forme sur le papier et préfère en parler de vive voix.

  • 4.3 Peux-tu préciser comment ou par quelles actions cela pourrait prendre forme ?

La plupart milite pour des rencontres entre Mensans : « Rencontrer des alter ego », « l’échange d’expériences », « par le dialogue ; c’est fou comme le texte du début est rassurant lorsque je le lis ; je me dis que je ne suis pas seule dans cette situation », ou encore « des conseils de gens qui sont passés par là, et qui peuvent me mettre en garde sur les pièges à éviter et les attitudes à adopter. »

Dans un deuxième temps, beaucoup de réponses suggèrent de formaliser, en quelque sorte, « une information sur les spécificités des adultes surdoués, en rassurant ceux qui viennent, en leur proposant des rencontres avec d’autres personnes comme elles. » Un autre complète ce propos en proposant « une réunion sur ces sujets, ou alors un échange avec un membre qui a connu les mêmes problèmes. »

Le recours à des professionnels « psys » reste une dernière hypothèse envisageable : « Je pense que des questions/réponses et des suggestions de parcours pour mieux vivre donnés par des psys pourraient m’aider et aider les autres membres. Si cela pouvait être ajouté dans le site de Mensa et créer aussi un forum de discussion sur des thèmes de problèmes communs et pouvoir échanger des idées pour un soutien des uns et des autres. Avoir aussi une liste de psys, en France, qui connaissent notre monde et avec qui on pourrait prendre contact pour pouvoir trouver des solutions à nos petits problèmes, personnellement je pense que cela pourrait m’aider » , « Au début on cherche beaucoup d’informations sur la douance, je pense qu’une intervention de groupe d’une psychologue de temps en temps pourrait être bénéfique. »

  • 4.4 Te reconnais-tu dans une des catégories suivantes ?

Dans les réponses qui suivent, les adhérents ont validé ou non les affirmations écrites (le chiffre est à comparer aux 25 réponses). Certains y ont ajouté des commentaires.

Adulte qui se cherche encore à 40 ans ou 50 ans voire plus (12)

– A la fois conscient de mes aptitudes et de leurs limites, je m’en sers du mieux que je peux. Cela n’empêche pas les doutes et le fait d’être en recherche perpétuelle.

– Un peu : je suis consciente de ma douance. D’un côté je l’utilise sans scrupules dans mon métier scientifique, d’un autre côté j’essaie de la mettre de côté, de ne pas la montrer pour garder une vie sociale agréable.

– Renoncer à vivre sa douance : disons qu’en m’adaptant au monde qui nous entoure, forcement je sous-exploite mes capacités. Je ne les utilise que pour me faciliter le quotidien, pour « bidouiller ». En ce sens j’en suis consciente, puisque je sais que si je veux je peux le faire, mais avec toujours cette peur de la perdre. Et puis il y a celle qui ne se contrôle pas, celle plus subjective qui nous fait voir le monde, les autres autrement. Rebelle ? Ah ça oui, je l’ai été ! Peut-être le suis-je encore un peu, mais de façon beaucoup plus soft, plus « casée ». Je ne pourrais jamais entrer complètement dans le moule, c’est certain, mais j’ai appris à prendre un peu de distance, à arrondir un peu plus les angles.

Adulte conscient de sa douance et qui l’utilise pour vivre son ambition ou assouvir sa passion (8)

– …mais qui l’utilise pour bien vivre et pour aider les autres à bien vivre.

– Ces deux phrases sont ok pour mon cas, rejoignant la notion d’équilibre difficile à trouver.

Adulte rebelle ou réfractaire au système, à l’autorité, marginal par conviction (8)

– Adulte rebelle ou réfractaire au système, à l’autorité, « marginale » par conviction rejet de cette normalité que je n’arrive pas à atteindre, peut-être ?

– …mais je me soumets quand même car il faut nourrir mes enfants mais changement de boulot tous les 2/3 ans. C’était comme ça avant ( marginal par conviction).

Adulte qui a renoncé à vivre sa douance et refusant de vivre pleinement (8)

– je pensais que c’était la solution pour vivre.

– je suis un conformiste : comprendre les lois de la société pour m’y conformer.

  • 4.5 Est-ce que tu te sens concerné par les caractéristiques suivantes ?

L’émerveillement presque enfantin devant des idées nouvelles (18)

…mais aussi l’ennui qui vient vite et l’absence de persévérance (15) « ça, c’est vraiment, mais vraiment mon plus gros défaut. »

Une hypersensibilité qui te fait ressentir les choses et surtout les gens avant de les comprendre ou de les connaître (17). Un précise « mais avec des erreurs. »

Difficulté à être heureux dans un monde aussi injuste, imparfait, dans lequel domine la misère. (14) « celle des enfants surtout. » ; « Oui mais comme les autres. »

Impression que j’ai un rôle à jouer dans cet univers pour essayer de diminuer la souffrance des autres (13)

Une fatigue de toujours mentaliser, réfléchir, penser… (10) « Non, j’aime cela en fait, toujours mentaliser, réfléchir, penser… peut devenir obsessionnel. »

Un refus de vivre le temps présent mais toujours anticiper ou réfléchir sur le passé (9)

– FAUX MAINTENANT, vrai avant.

– Plutôt une incapacité de vivre le temps présent.

– Je viens de prendre une claque à la lecture de toutes ces phrases donc OUI.

– Je souffre plus de la bêtise et de l’ignorance du monde, et plus encore du refus de chercher à l’améliorer par facilité.

– Pas vraiment. Parfois je me dis que j’ai de la chance d’être intelligente et que j’aimerais faire de grandes choses. Mais je crois que ce souhait est commun à beaucoup de personnes, même non surdouées. Et le problème des grandes choses, c’est qu’il faut un peu d’intelligence et d’inspiration pour les initier, et beaucoup de travail pour les réaliser.

Sentiment de peur excessive à cause de la guerre, de l’alimentation, de la pollution… (8)

– A cause de tous les dangers possibles et inimaginables, mais plus encore par rapport à mes enfants que pour moi-même. Et ça va du couteau dans le lave-vaisselle (lame côté bas pour ne pas qu’il s’embroche des fois qu’il tombe dessus un jour où la porte serait ouverte) aux pédophiles qui pourraient l’enlever dehors, aux voitures qui pourraient l’écraser, aux enfants de l’école qui pourraient le rejeter, anticiper les causes de tristesses ou de malaise, la nounou qui serrerait trop les couches de la petite et donc elle se sentirait mal toute la journée… ce genre de peurs-là qui peuvent sembler banales mais qui prennent une place exagérée chez moi… Je me fais penser au papa de Némo, le petit poisson… Ça traduit aussi un manque de confiance.

Culpabilité liée à la différence avec les autres (5)

– Plutôt du dépit, du découragement, de la frustration peut-être.

– Ça non, jamais. Je m’inquiète pour mes proches de savoir s’ils ont bien compris, je m’exaspère pour les moins proches de voir qu’ils ne comprennent rien, mais pas de sentiment de culpabilité.

– Elle peut être un problème lorsque cette spécificité n’est pas connue ou acceptée par l’entourage du futur adulte.

  • 4.6 As-tu le sentiment que tes pensées, tes idées bouillonnent toujours dans ton cerveau et que cela peut s’avérer fatigant ? Que tu aimerais que cela s’arrête un peu ?

– Oui (4)

– Avant oui, maintenant je profite de cette richesse.

– C’est fatigant mais pas de gêne.

– Je l’ai fait pendant un temps, une pause de quelques années. Ensuite j’ai passé et soutenu une thèse… Comme quoi on ne peut renier très longtemps sa nature. Personnellement je l’ai exprimée de cette manière. A chacun la sienne.

– Fatigant pour les autres, ceux qui me supportent et qui ont parfois du mal à me suivre, ça c’est certain ! C’est plus dans les conversations que ça se sent, on me dit souvent que je passe du coq à l’âne. Mais le plus souvent je garde pour moi. Je ne peux pas m’empêcher de penser à plein de choses, revenir sur l’actualité, ou simplement sur ce que je vois, analyser le comportement d’un tel, les sentiments d’un autre, réfléchir à ce qu’on pourrait faire pour que telle ou telle chose soit mieux, mais même de manière inconsciente. A oui, souvent aussi je me réfugie dans des mondes imaginaires, je m’invente des histoires. Il y a plusieurs parties qui fonctionnent en même temps. Que ça s’arrête ? Je l’ai voulu plus jeune, mais plus maintenant. Je crois que je ne m’y reconnaîtrais plus, j’aurais l’impression de perdre quelque chose, d’être handicapée. Ou alors les questions existentielles, du moins celles liées à la mort. Ça oui, j’aimerais qu’elles s’arrêtent. Je pense à mon devenir, celui de mes enfants. Je suis terrorisée à l’idée qu’un jour eux aussi mourront. J’angoisse à l’idée que cette idée les terrifie. Je prie pour que la religion soit pour eux un assez bon opium.

– La lecture permet de freiner l’activité cérébrale, c’est mon remède.

– Oui, des fois, des fois non.

– Oui, oui, oui. J’ai aussi trop de centres d’intérêt, ce qui m’empêche de m’investir beaucoup dans un seul et donne quelques fois l’impression que je papillonne.

– Je n’ai pas envie que ça s’arrête, mais c’est fatigant et je me repose ou m’aère l’esprit.

– Oui. Mais je ne souhaite pas que ça s’arrête mais plutôt apprendre à utiliser, canaliser quand c’est nécessaire ou utile.

– Pourvu que ça dure.

– Non, je ne trouve pas ça fatigant mais j’ai l’impression que je tourne un peu en boucle parfois et en parler avec des Mensans peut permettre de sortir de la boucle.

– Non, pas vraiment, bien que beaucoup de gens me reprochent de trop réfléchir, je n’éprouve pas de fatigue particulière.

– Je regarde une série américaine pour que ça s’arrête.

– A vrai dire, je suis habituée, ça ne me gêne pas du tout, mais je fatigue les autres qui me demandent régulièrement d’arrêter de penser… je leur réponds ok, mais toi, en échange, tu arrêtes de faire battre ton cœur…

– Pendant très longtemps, je n’arrivais pas à « arrêter » mon cerveau, j’étais insomniaque. Je pouvais laisser divaguer mes pensées pendant un temps et remonter le fil de celles-ci ; repérer les axes qui me faisaient passer sur d’autres sujets et je remontais le temps… la fameuse pensée en arborescence ! C’est un exercice que j’ai souvent fait et puis j’ai arrêté petit à petit de le faire ; aujourd’hui j’en serais incapable. Je n’ai plus l’impression d’avoir un cerveau qui bouillonne ; peut-être par manque d’alimentation ou bien Alzheimer…

– Mes idées ne bouillonnent pas mais j’ai une concentration et rapidité que j’estime de temps en temps salutaire.

– Non. J’ai toujours le cerveau en activité, mais cela ne me fatigue pas, au contraire, cela me stimule.

– Cela avait souvent lieu quand j’étais plus jeune, surtout au moment de m’endormir, mais maintenant cela va bien mieux.

– J’ai ce sentiment, mais pas de fatigue. J’arrive maintenant plus ou moins à m’arrêter de penser ou à me concentrer sur autre chose.

– Ça m’est très difficile de répondre à l’ensemble de ce dernier item. En fait, je pense que je fais abstraction de tout cela et que ma douance n’est ni un avantage ni un handicap. Je fais avec, sans plus, même si parfois ce n’est pas évident.

– J’aimerais que cela s’arrête un peu, mais je ressentirais vite un manque. C’est comme si l’on me demandait si j’aimerais arrêter de respirer parce que cela peut s’avérer « fatigant ».

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